Afrique… Terre de champions
Série MMA Scolaire et Universitaire. #Ep3
Interview de Frédéric RUBIO (Enseignant d’eps, Expert lutte), par cédric CERTENAIS (mma.re)
Frédéric, avant de parler de MMA, peux-tu nous « raconter » brièvement « ton Afrique » ?
Effectivement, cela risquerait d’être hyper long (hm hm), aussi, je m’en tiendrai à l’extrait d’un article du journal « le Monde » du 27 avril 1995, au lendemain de l’organisation à Niamey des 1ers Championnats d’Afrique de lutte traditionnelle, style nommé officiellement « Lutte Africaine »**.
« Un Français, Frédéric Rubio, a également largement contribué à cette reconquête. Spécialiste de la discipline, il parcourt depuis cinq ans l’Afrique en VRP de la lutte, forme des directeurs techniques nationaux, des arbitres et tente d’établir des structures solides dans tous les pays. Turcs, Iraniens, Arméniens s’appuient sur leur pratique traditionnelle pour s’imposer en lutte olympique, explique-t-il. Il est cependant important que l’on garde l’environnement culturel afin que les Africains continuent à se reconnaître dans ce sport. »
« Au sein d’une commission, Frédéric Rubio a également participé à l’élaboration de règles communes, les techniques de lutte variant jusqu’alors avec les ethnies ». (Benoît Hopquin).
** http://lacroche.re/articles.php?lng=fr&pg=136557 ou encore :
Sans aller plus loin dans « mon » histoire, il serait bien de préciser, puisqu’il va être question de MMA, que ma mission officielle en débarquant en Afrique a été dans un premier temps de m’occuper uniquement de lutte olympique, en tant que sport olympique, sans tenir compte des réalités locales !!
En allant d’un pays à l’autre, j’ai vite compris que la lutte traditionnelle était omniprésente quasiment partout sur le continent dans sa partie subsaharienne et qu’il fallait partir de cette réalité culturelle pour la structurer, l’organiser, l’harmoniser et l’enrichir sur le plan pédagogique, avant de parler de lutte libre et de lutte gréco-romaine, styles qui nécessitent des équipements particuliers fort couteux.
C’est sur la base de ce travail que se sont constituées, par la suite, un certain nombre de Fédérations Nationales Africaines de Lutte reconnues par la FILA-UWW.
Aujourd’hui, le MMA fait partie de la dimension sportivo-médiatico-culturelle du XXIème siècle. Faudrait-il l’ignorer ? Eviter d’en parler dans le milieu scolaire ? Ou bien se l’approprier en lui faisant « subir » un traitement didactique afin de rendre cette discipline de combat hautement éducative, comme peuvent l’être le football, l’athlétisme… Quand les éducateurs de clubs et/ou les professeurs d’EPS voudront bien « didactiser» l’activité ? Vingt ans après, en d’autres lieux, on a un peu l’impression que les mêmes questions se posent.
Puisqu’on parle de sports de combat en Afrique, comment étaient perçues les luttes traditionnelles au niveau de la transmission culturelle ?
Sur le plan éducatif, la colonisation a cherché à plaquer les enseignements du monde occidental. C’est ainsi que dans la plupart des Centres de Formation de cadres en EPS, était enseigné à Dakar, Ouagadougou, N’Djamena, Bamako, … principalement le Judo. La lutte traditionnelle était perçue comme une activité issue de la ruralité (brousse), assez violente voire dangereuse et pratiquée par des individus virils et combatifs. Il a fallu changer cette image et prouver que la « lutte africaine », appartenant au patrimoine culturel de ce continent, pouvait être éducative et donc enseignée dans les écoles, collèges et lycées. Les travaux, en collaboration avec la Confejes (Conférence des MJS francophones), ont permis alors d’élaborer des progressions dans le but d’armer pédagogiquement les collègues pour qu’ils puissent proposer des contenus d’enseignement éducatifs en toute sécurité.
Aujourd’hui, la lutte africaine, au même titre que d’autres sports dits olympiques, fait partie des programmes d’enseignement dans l’ensemble des pays africains. Elle fait l’objet de tournois continentaux comme celui de la Cedeao, et de compétitions internationales à l’occasion des Jeux de la Francophonie. Cette « démarche » pourrait-elle intéresser, inspirer la prise en compte, l’évolution future du MMA ?
Tu as eu l’occasion durant ta carrière d’encadrer des lutteurs africains au niveau de différents événements comme les Championnats d’Afrique, les Jeux Africains ou encore les Jeux Olympiques. Que représente pour toi le haut niveau ?
Tout d’abord, il est important de bien différencier les disciplines sportives en fonction des besoins, des conditions qu’elles nécessitent pour bien se préparer, bien s’entraîner. Certaines épreuves sont plus « naturelles » que d’autres, dans le sens où elles font davantage appel aux qualités physiques de départ comme l’endurance, la vitesse, la force…
L’escrime fait partie des sports de combat et nécessite d’autres moyens liés aux équipements, à la technologie, aux infrastructures autres que la simple pratique de la boxe ou de la lutte. Cependant, quelle que soit l’activité sportive, le haut niveau se joue et se jouera toujours au millimètre. L’interview de Stéphane Uriac à propos de la préparation physique est assez clair à ce sujet. Il ne peut pas y avoir d’improvisation et le « millimètre » concernera aussi bien la préparation physique que la préparation technique, technico-tactique et mentale, et suivant les lieux et les pays, il sera difficile de partir à égalité.
Concernant le MMA, on constate d’une part que les meilleurs viennent d’horizon divers, couvrant ainsi les différents continents et, d’autre part, que l’Afrique possède un énorme potentiel lorsque le/les combattant(s) se trouve(nt) dans des conditions optimales de formation et de préparation.
Parallèlement à cela, on constate également que le haut niveau passe, entre autres, par les Jeux Olympiques. En effet, pour qu’une discipline émerge au niveau mondial et qu’elle ait la reconnaissance de tous les peuples de la planète, sa présence aux J.O s’avère incontournable.
Le MMA pourra-t-il intégrer ce type d’événement ?
Pour que cette inscription parmi les épreuves olympiques soit un jour d’actualité, il est évident qu’une des obligations concernera la nécessaire dimension éducative et pédagogique de ce sport de combat du XXIème siècle. C’est le pari qu’est en train de faire un groupe d’enseignants EPS, spécialistes de sports de combat dans différentes disciplines, en créant une Association intitulée « MMA SCO », en direction du milieu scolaire et universitaire.
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